Hors cadre #8 : Corentin Gaborit

À la MJC Ronceray, Le Mans.

Gaborit Corentin les Photographiques

Lors d’un dimanche après midi de décembre, lorsque je décidais d’aller me balader aux alentours de chez moi, longeant 
la Sarthe, je me suis arrêté devant les portes de ce cimetière, le cimetière du Grand Ouest. Les drapeaux ottants à l’entrée et l’inscription ''Common wealth'' me donnèrent alors l’envie d’y entrer.
Au départ, je me baladais simplement d’allée en allée, l’appareil photo autour du cou, puis j’ai commencé à shooter les croix omniprésentes de ce lieu. C’est alors que je me suis penché sur le carré militaire. J’ai donc commencé à prendre quelques photos de ces tombes de soldats. Je fus alors marqué par certaines tombes comme celle de ce soldat juif au milieu de tous ces allemands, ou encore de ces deux soldats inconnus. 
Puis, à la manière d’Eugène Smith, j’ai commencé un essai photographique, essayant de capturer les photos parfaites. Je fus alors curieux d’observer que malgré l’ancrage et l’immobilité de ces tombes, l’environnement qui les berce, lui, change chaque seconde. Du ciel aux feuilles des arbres, tout ce décor s’avère être bien vivant. Plus tard, lors de la période de neige au Mans, j’étais dans mon école quand me vint l’idée certaine, à la pause méridienne, de retourner au cimetière afin de capturer ce moment. Arrivé là-bas, tout cet ensemble me semblait encore plus figé, j’ai alors trouvé qu’une certaine poésie se dégageait de ce lieu lorsqu’il était enneigé. Presque obnubilé par ce cimetière, j’y suis ensuite retourné plusieurs fois, tant les histoires de chaque militaire enterré ici me fascinaient, dont la plupart d’entre eux n’avaient d’ailleurs jamais reçu aucune visite.


Au début de ce projet, je travaillais au 35 mm puis tirais chacune de mes photographies argentique à la chambre photographique. En observant mes tirages, un d’entre eux m’obséda : il s’agissait de la photographie nommé ''Albert Guerin''. Je passais alors des nuits blanches à la recherche d’informations quelconques à propos de cet inconnu. Constatant l’intérêt que je portais à cette réalisation, je décidais alors de la tirer dans un format 2m30 par 1m30. L’échelle presque réelle de ce paysage nous donne ainsi l’impression de pouvoir avancer sur les
tombes. C’est donc naturellement avec ce cliché que mon travail autour de ce cimetière a vraiment commencé.
Parallèlement, j’ai écrit ces lignes sur place lors de mes premières visites au cimetière, qui me semblent re été parfaitement l’idée de cette série de photos :
''Les cimetières ont tous leur histoire. Comme chacun d’entre nous.
Ils ont tous quelque chose de di érent.
Ici, les regards ne se croisent pas.
Ce sont seulement les vies qui se rejoignent, et nissent, au même endroit.
Le cimetière et les sépultures se dégradent.
Certains tombes semblent si vieilles qu’elles semblent n’avoir vu personne depuis des années.
Tous ces soldats. C’est d’abord ces soldats morts qui ont marqué mon envie de venir dans ce cimetière, ces Français, ces Belges, ces Américains, ces Russes. La majorité d’entre eux n’a sûrement jamais reçu aucune visite ou seulement lors des cérémonies nationales.
 Cette serie , je l’adresse à la mémoire de tous ces individus oubliés.
 À ce soldat inconnu. 
À cette combattante russe.
 À ce soldat juif.
 À toutes les personnes qui continueront à visiter ces tombes. Pour que nous n’oubliions jamais.
 À la mémoire.''

 

Corentin Gaborit

Jeune homme de 21 ans étant captivé par l’art depuis le plus jeune âge, j’ai souhaité m’y intéresser de plus près en suivant un Bts design graphique que j’ai obtenu en 2017. Celui-ci m’a notamment permis de découvrir l’édition. J’ai cependant eu envie, suite à cela, d’apporter à ces connaissances une approche davantage artistique, ayant acquis la technique nécessaire pour y parvenir. C’est donc pourquoi je me suis dirigé vers l’École des Beaux-Arts du Mans. C’est ici que j’ai pu découvrir la photographie argentique à laquelle j’ai consacré toute la première année de ma licence. J’ai pu alors réaliser différents projets tirés de mes diverses inspirations du photoreportage de guerre, dans lesquelles on retrouve des photographes célèbres tel qu’Eugene Smith ou David Goldblatt, mais également des francophone comme Yan Morvan. C’est donc avec les Beaux-Arts que j’ai pu développer cette approche particulière de la photographie : un retour au procédé argentique a l’air du numérique. Les nombreuses possibilités techniques ouvertes par l’école m’ont également beaucoup aidé dans la réalisation de mon travail. Travail dans lequel nous retrouvons un thème récurent : La Mémoire et en particulier la Mémoire de guerre.